CARNET DE ROUTE ALGER-TÉBESSA
La nuit pour
compagnon de route
La gare routière de Kharrouba assurant le transport de voyageurs par route sur l’ensemble des wilayas du pays est toujours animée, y compris la nuit. Les différents commerces sont toujours
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Certains voyageurs soucieux ou rêveurs scrutent, à travers les vitres, l’horizon bleu de la Méditerranée. D’autres ont les yeux rivés sur le coucher du soleil qui illumine la baie d’Alger. |
ouverts à la grande satisfaction des clients.
«Vous allez rejoindre la ville de Tébessa aprés 9h ou 10 h de route», s’exclame, à notre intention, l’agent de la société SOGRAL, chargé d’enregistrer les billets à destination de cette wilaya doublement frontalière avec la Tunisie et la Libye. Le caissier n’a pas manqué de souligner pour un autre passager qui a «brûlé» la file indienne qu’il y a un départ à17h 30. Ceux de 15h30, 16h, 16h30 et 17h affichent complet. «La fin de la semaine et la veille du premier jour de la campagne électorale expliquent amplement cette forte pression sur cette destination», dira un jeune Tébessi qui semble être un habitué des lieux.
La gare routière de Kharrouba assurant le transport de voyageurs par route sur l’ensemble des wilayas du pays est toujours, dit-il, animée, y compris la nuit. Les différents commerces sont toujours ouverts à la grande satisfaction des clients. Un jeune agent circule, avec sa machine roulante, à la recherche d’un moindre mégot ou détritus jetés sur le sol.
Même le tableau électronique qui émet, à l’entrée, un faisceau de lumières attire les voyageurs à la recherche de l’information sur les arrivées et départs attendus pour la soirée. Avec la sécurité revenue, les gens voyagent, de plus en plus, la nuit, sur de longues distances.
Les noctambules sont désormais légion sur toutes les destinations aussi lointaines soient-elles comme Tébessa ou Hassi Messaoud. Les routes sont sécurisées sur l’ensemble du territoire national. Les voyageurs préfèrent ainsi prendre «le car de nuit», selon notre compagnon, pour «gagner» la journée du lendemain qui sera consacrée aux préoccupations du jour. D’autres préfèrent ainsi un long week-end en famille. «Cela procure aussi certaines sensations nocturnes ou des rêveries durant le voyage qui réunit un monde composite et complice pour une longue nuit durant», a-t-il ajouté, en me rejoignant sur la double banquette du bus encore rutilant.
Les derniers passagers rejoignent leurs places au fond du car. Le bus gris Hyundai quitte le quai comme prévu, à 17h 30 pile. A cette heure-ci de la journée, la circulation manque encore de fluidité sur l’Avenue de l’ALN. Mais les automobilistes ne semblent pas pressés pour autant de rejoindre leurs foyers. Le chauffeur donne un coup d’accélérateur pour dépasser, en arrivant devant la première bretelle de Bordj El Kiffan.
Certains voyageurs soucieux ou rêveurs scrutent, à travers les vitres, l’horizon bleuâtre de la Méditerranée. D’autres ont les yeux rivés sur le coucher du soleil qui illumine la baie d’Alger. Le spectacle est accompagné à l’intérieur du bus par une musique classique qui invite les passagers au voyage.
Le conducteur qui semble maîtriser la conduite ne fait pas non plus de secousses. C’est ainsi que le temps ne se fait plus sentir. La nuit tombante nous rattrape juste à l’entrée du nouveau tunnel de Bouira qui s’étire sur plusieurs kilomètres.
«Le nouveau tronçon d’autoroute Est-Ouest qui vient d’être inauguré par le président de la République a rendu d’énormes services aux usagers qui ne subissent plus les longs embouteillages de la ville du Djurdjura», dira un jeune vendeur pharmacie devenu mon compagnon de route. Un cri provenant de derrière interpelle le conducteur pour s’arrêter au prochain arrêt, au niveau du faubourg «M’hir». Il s’agit d’un café restaurant choisi comme halte par les transporteurs qui effectuent les lignes de nuit. Tout le monde descend. Le dîner ou d’autres besoins urgents oblige.
ROUTES SÉCURISÉES
Le bus se vide de ses passagers qui rejoignent le café ou le restaurant d’en face. Des jeunes serveurs aux blouses blanches font des signes de main pour nous inviter à prendre table sous la chandelle. Sonelgaz a procédé au délestage, selon le propriétaire du restaurant qui parait gêné par l’accueil. Mais l’atmosphère est plutôt bon enfant. D’autres compagnons de route font la chaîne devant une salle d’eau pour faire les ablutions du soir en vue d’accomplir les prières d’El Maghrib et d’El Aicha.
Un «mossala» (salle de prières) est aussi disponible juste à coté. «Profites-en pour te dégourdir les jambes», me lance Hocine, en reprenant pied dans ses chaussures. Une bonne demi-heure après, le bus reprend la route sous une pluie fine de printemps. La coquette ville d’El Eulma est, poursuit-il, notre prochaine destination. Les langues se délient entre les uns et les autres.
Cette ville a connu, selon le receveur qui discute avec un passager, un développement local réussi. «L’urbanisme et l’esthétique des façades des immeubles qui longent l’avenue principale sont impeccables», estime-t-il. Une autre discussion s’emballe, à l’arrière, au sujet de la prochaine élection du 9 avril prochain. L’atmosphère devient ainsi conviviale. Un arrêt devant un poste de contrôle militaire. Deux gendarmes montent dans le car pour un contrôle de routine. «Les gens sont inondés par des problèmes inextricables à Tébessa, livrée aux seigneurs de la contrebande», estime un vieux de la vieille qui parle à haute voix. Mais les dormeurs, la tête penchée en avant, contre le dos de la banquette, continuent leur sommeil.
Cela ne doit pas les empêcher d’aller voter, poursuit-il, pour changer cette situation à leur profit. «Le changement est possible en Algérie par les urnes», a ajouté le jeune vendeur qui travaille dans une pharmacie sur les hauteurs d’Alger.
2H DU MATIN À OUM EL-BOUAGHI
De beaux cafés et restaurants sont également ouverts, dans l’attente de flots des voyageurs dont les transporteurs sont «accrédités». Trois ou quatre bus sont déjà sur les lieux.
Le receveur nous propose de prendre le café du matin. C’est ainsi que les transporteurs choisissent leurs commerces fétiches pour déverser des lots de clients. La caravane reprend cette fois-ci la route sans tarder. Mais la fatigue se lit sur les visages. Plus de 7 heures de route au compteur de la pendule. Le sommeil a surpris presque l’ensemble des occupants du car qui roule sur la ville de Ain Beida. Le chauffeur fait de la vitesse.
Le ronflement du moteur se fait entendre. Un autre contrôle des bagages est effectué. Au fil des heures, le petit jour commence à pointer son nez au loin, en brisant les quelques ténèbres. La nuit la plus longue vient de prendre fin à la gare routière de Tébessa. Il est 4h30 du matin. La ville de Larbi Tébessi n’est pas encore réveillée.
Des chauffeurs de taxis qui s’approchent du car proposent des voyages pour la Tunisie ou la Libye. Le froid glacial nous pousse à rejoindre le café à côté, en attendant la levée du jour.
Reportage réalisé par :Meziane Atmani.
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